Mathieu Bersot – UPCBD : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin!

ParlonsCanna
Aujourd’hui dans Parlons Canna, nous sommes avec Mathieu Bersot, délégué de l’Union des Professionnels du CBD (UPCBD). Dans ce podcast, il nous retrace son parcours de combattant dans le monde du cannabis et du CBD. En première ligne dans cette lutte pour la légalisation, il nous explique pourquoi est-il important que la filière s’organise.
Qui es-tu? Quelle est ton histoire avec l’UPCBD?
Mathieu Bersot a 34 ans et 34 feuilles de cannabis tatouées sur son corps. Cela représente bien à quel point cette plante est significative pour lui. Ancien du social, il a travaillé comme éducateur spécialisé pendant 10 ans. Mais Travailler dans l’humain aussi longtemps ça rend paradoxalement inhumain selon lui. Il a donc décidé d’arrêter du jour au lendemain pour vadrouiller. Très jeune, il a commencé à consommer du cannabis. Pas forcément en fumant, mais en plantant ses propres graines. À 17 ans, il crée ses premières greffes, et à 20 ans, il part étudier les plantes aux Etats Unis et en Hollande. Jamais il n’avait pensé en faire son métier un jour, surtout avec la connotation de toxicomane que prend le cannabis. De fil en aiguille, il réussit à développer ses propres techniques. Avec la démocratisation du CBD en France, en 2018, il ouvre sa boutique.
Qu’est-ce qui t’a attiré ce combat avec l’UPCBD?
Il est vrai qu’à la base, il est un consommateur averti. D’un autre côté, c’est aussi le combat pour la plante qui l’a attiré. Étant une personne qui vit de ses convictions, Mathieu s’est rendu compte que le social est inévitable. Ses convictions pour le cannabis, il vit avec depuis des lustres sans pouvoir les afficher. Aujourd’hui qu’il le peut, il veut combattre pour le cannabis. Son combat personnel est pour la légalisation sous n’importe quelle forme, ou du moins pour la dépénalisation du consommateur, qui paie injustement pour le trafic international. Au niveau de l’Union, le combat consiste à organiser la filière, à réguler et à proposer un produit sain au consommateur.
Comment es-tu arrivé à l’UPCBD?
En 2018, il a lancé la boutique Brin d’Herbes. Un an plus tard, certains acteurs de la filière comme Mao Aoust et d’autres parlaient déjà d’une union, mais ne savaient pas trop comment articuler la chose. En 2020, cette dernière voit enfin le jour et porte le nom de l’Union des Professionnels du CBD. Et puis un jour, Mao, voyant Mathieu très actif sur les réseaux sociaux, s’intéresse à lui. Il décide donc de lui téléphoner et lui demande de descendre à Marseille pour discuter. Mathieu est vite séduit par le fait que des gens soient prêts à se rassembler et à faire quelque chose pour le cannabis. Il adhère à cette union.
De nos jours, il y a plus de professionnels du cannabis par rapport aux quarante précédentes années. Il est vrai que depuis longtemps, beaucoup d’associations ont lutté pour la légalisation. Mais la différence avec l’UPCBD, c’est qu’on peut s’appuyer sur les connaissances de professionnels pour prouver à l’Etat que le cannabis n’est pas dangereux.
L’UPCBD est constitué d’un noyau de grands et de moins grands, pour ne citer que Charles Morel et David Aran de CBD’EAU. Deux des plus gros acteurs de la filière font partie de cette union. Plus fascinant encore, ils sont concurrents sur le terrain, et associés au niveau de l’union. Ils font avancer la filière ensemble, et c’est extraordinaire en termes d’humanité.
Contre qui se bat l’UPCBD?
“On a un ennemi commun. C’est incroyable de devoir se battre contre un Etat qui est censé veiller à notre bien être. On est en train de stigmatiser une fleur qui est une plante. Tout le monde prend des plantes tous les jours. Souvent, je pose la question aux gens: est-ce que vous savez ce qu’il y a dans le doliprane? Non. A quel âge en avez-vous donné à vos enfants pour la première fois?…Et ils commencent à se rendre compte de l’hypocrisie de la chose. C’est ce que je dis souvent en magasin pour montrer qu’il ne faut pas diaboliser quelque chose qu’on ne connaît pas”.
Comment expliquer le décalage entre la France et l’Europe?
L’Europe est en avance sur son temps tandis que la France affiche encore une certaine réticence en ce qui concerne le cannabis et le CBD. Selon Mathieu, ce décalage est traditionnel.
“La France est toujours en décalage que ce soit sur l’automobile, le fast food, le parfum… A chaque fois qu’il y a quelque chose de nouveau, elle est en décalage parce qu’on perd un temps fou à s’imposer des règles. En France, on est obligé de faire des études françaises pour prouver que le cannabis n’est pas dangereux. On ne va pas s’appuyer sur des études internationales qui sont excellentes. On préfère attendre que la France fasse le travail qu’elle ne veut pas faire. Tout simplement parce que le gouvernement a comme discours que la combustion, le tabac et le cannabis sont mauvais. En associant les trois en un, pour eux, prendre du cannabis c’est fumer un joint”!
Selon Mathieu, dans un reportage où tous les candidats à la présidentielle ont été interviewés, aucun ne savait faire la différence entre le CBD et le THC.
“C’est très choquant de se dire qu’ils peuvent nous interdire de vendre ce produit”.
Quelle est la réalité autour du cannabis?

Actuellement, nous traversons une crise économique à l’échelle internationale, mais nous sommes surtout au début de quelque chose. Le cannabis ça fait du bien et peut être utilisé à plusieurs niveaux: écologique, bien-être, culture, isolation, etc. C’est une plante magique que nous sommes malheureusement en train de laisser mourir, nous plus que les autres.
En effet, il reste encore plein d’autres pays où le cannabis est mal considéré. On dit que l’Europe est en train de légaliser mais ce n’est pas totalement vrai. Il faut savoir de quelle légalisation on parle : du cannabis légal, ou du cannabis récréatif. Même en Espagne où les cannabis social club se démocratisent, il ne s’agit pas de légalisation mais d’un regroupement de producteurs qui vendent sous système associatif à des consommateurs. C’est donc plus une régulation du marché qu’une légalisation d’Etat.
Pourquoi ne suivons-nous pas l’exemple des autres pays où c’est légal?
La France est le plus gros consommateur d’Europe. Il y a tout un écosystème qui vit derrière. Aux Etats Unis, des villes sont devenues beaucoup plus riches grâce à cet écosystème. Par exemple, au Colorado, lorsqu’ils ont légalisé, ils ont eu tellement d’argent grâce aux taxes qu’ils ont investi dans les établissements, rénové les hôpitaux et les écoles les cinq premières années. La sixième année, ils ont reversé 1000 dollars à chaque habitant de l’État. En suivant l’exemple, nous pourrions récupérer les taxes, garantir des produits de qualité, éduquer, protéger, isoler, nourrir, soigner, détendre, limiter le réchauffement climatique, etc. Malheureusement, nous nous focalisons trop sur l’être humain, en ne réfléchissant que par profit.
Pourquoi c’est interdit?
“L’argent dirige le monde, et le chanvre ce n’est pas de l’argent. Tout le monde peut en faire. Il pousse sur n’importe quel terrain comme de la mauvaise herbe. le chanvre est impossible de modifier génétiquement. Il peut être pollinisé partout, ce qui le rend d’autant plus incontrôlable. Et quand on ne peut pas contrôler une chose, l’interdire est plus facile”.
La prohibition résulte aussi de différentes raisons, comme le pétrole et la loi raciale aux Etats Unis. Historiquement, le cannabis était considéré comme une chose qui rendait les noirs et les philippins violents. Depuis, cette loi a été abolie, mais tout part de là.
Puis, il n’y a qu’en France qu’on fait la distinction entre chanvre et cannabis. Pourtant, il s’agit bien d’une seule et même chose. La seule différence est que le chanvre est un mot français, tandis que le cannabis vient du latin. Les deux mots ont été dissociés parce que la France fut jadis le plus gros cultivateur de chanvre pour la marine, puis a continué à produire du chanvre industriel avec la mise en place des catégories sativa L, du catalogue européen, etc.
Les valeurs fortes de l’UPCBD

Eduquer
La première valeur forte de l’union est l’éducation. Le consommateur doit savoir qu’on parle de cannabis à prédominance CBD et d’extraction. En d’autre termes, il faut lui apprendre que le CBD est simplement une molécule.
Être protégé
À l’UPCBD, l’idée est de fédérer un maximum de personnes, et de défendre une certaine éthique au sein des produits cannabis à prédominance CBD. Le but est de montrer les bons produits et surtout de protéger le consommateur des dérives face à un marché qui est non contrôlé. Selon Mathieu, le CBD est à ce jour le seul produit de consommation de base qui n’est pas régulé ni testé.
Être représenté et défendu
Avec la récente interdiction de la fleur, sans les personnes qui se sont regroupées, les avocats, les études, etc., la filière aurait pu disparaître du jour au lendemain..
“Il y a eu un test d’interdiction de la fleur, en décembre. On a contre-attaqué et on a réussi à faire suspendre cette interdiction en février. C’est hyper important pour la filière parce qu’à ce moment-là, la fleur représentait 70% des chiffres d’affaires des magasins. Entre-temps, un autre décret sur le cannabis médical est sorti, où encore une fois, quelques points ne concordent pas. Seul le ministre de la santé aurait le pouvoir de dire si un produit à base de cannabis est un médicament ou non, mais prendre des décisions unilatérales au sein d’un gouvernement n’est jamais une bonne idée.
Se constituer en réseau et échanger
Il y a différents acteurs dans l’UPCD: producteurs, marques, avocats,…. Le fait de les fédérer permet de voir ce qui se fait partout en France et en Europe. Comme dans toutes les activités, il y a toujours des personnes opportunistes. Il faut rester prudent, surtout dans un marché naissant comme celui du cannabis. Avec une éthique qui est mauvaise et le non-respect des valeurs qu’on défend, nous ne serions jamais écoutés comme nous le devrions.
Être accompagné
Plein de gens sont disponibles dans l’UPCBD. Mathieu lui, répond sur le site, même si parfois ça peut prendre un peu de temps. Selon lui, il y a pas mal de questions auxquelles il doit répondre, mais il essaie de faire au mieux. Maître Morel est aussi très présent, ainsi que tout le conseil d’administration, pour répondre à toutes les questions. Le but est de lisser une certaine réglementation afin de donner une même réponse. C’est important car en France, il existe un problème régional avec le CBD. Par exemple, dans certaines régions, des procureurs ont décidé de sanctions plus ou moins sévères.
Être informé
L’UPCBD produit des lettres d’informations, est aussi sur internet et sur les réseaux sociaux Facebook, Twitter et Instagram. Le but est d’être assez présent pour répondre à toutes les questions, sans forcément toucher les consommateurs. L’idée c’est de les défendre. C’est donc quand même important qu’ils connaissent l’existence de l’union. Dans le futur, Mathieu espère travailler avec des associations de consommateurs. Cela permettrait d’avoir une réelle connaissance du marché, de la graine jusqu’à la revente, et de définir ce qu’il y a de bon ou de mauvais.
Amplifier sa visibilité
L’avantage d’adhérer à l’UPCBD, c’est que tous les autres professionnels peuvent vous connaître et travailler avec vous, même entre concurrents. Au sein de l’union, ce n’est pas un problème car s’il n’y a plus de filière, il n’y a plus de concurrence. Il faut se battre ensemble pour arriver au même endroit.
Quel est l’appel que tu lances?
“Plus il y a d’adhérents, plus on est forts, plus notre voix est puissante. Les associations de consommateurs ne doivent pas hésiter à nous contacter. On a tous le même combat, même si nous ne sommes pas d’accord sur certains points. Nous devons réussir à mettre en place cette union”.
L’UPCBD représente toute une filière. La finalité c’est de mettre en place des partenariats entre professionnels et associations d’adhérents. Cela n’empêche pas les particuliers de venir se renseigner. Le prix de l’adhésion est fixé en fonction des tranches de chiffres d’affaires. Il varie entre 50 et 1500 euros.
Un dernier message inspirant
“Seul on va vite, ensemble on va plus loin. Pour le moment, nous sommes dans la phase où l’on va vite. Le problème c’est que quand ça va fort, ça s’arrête fort. Il faut charger le feu! Ceux qui s’occupent de charger ce feu, c’est nous! Venez nous voir, nous allons vous informer et vous aider”.
C’est sur ces mots que Mathieu Bersot conclut cette interview enrichissante.
Pour en savoir plus sur les autres acteurs de la filière cannabis légal et CBD en France et en Europe, consultez nos podcast sur le site.